5 sorties à ne pas louper cette semaine : Arnaud Rebotini, Malena Zavala, Jaunt…
Fondateur et ex-rédacteur en chef d'Arty Magazine, le grand manitou…
Les semaines s’égrènent, les sorties se raréfient et le temps commence à se faire long. Si certains se réfugient dans les chocolats de Pâques ou le binge watching du catalogue Netflix, il n’est pas question de se laisser aller côté musique. On te droppe cinq sorties hétéroclites : le carnaval électro d’Arnaud Rebotini, la pop multiculturelle de Malena Zavala et les expérimentations géniales de Jaunt. On clôture notre tour d’horizon avec les deux formats courts d’Orfilab et Lësterr.
Malena Zavala – La Yarará (LP)
Notre morceau préféré : « What If I »
Le rythme se ralentit, les heures au soleil s’allongent, et les sorties s’amenuisent comme peau de chagrin. Au contraire d’un crève-cœur, c’est le prétexte inespéré pour écouter des albums auxquels on aurait prêté une oreille moins attentive, comme cet opus magique de la chanteuse Malena Zavala, qui de rythmiques latines en envolées vocales, nous transporte dans un monde d’amour et de pop fraîche. Oscillant entre l’espagnol de son single La Yarará et l’anglais de I’m Leaving Home, l’artiste tisse des connections entre les peuples et les cultures dans son foisonnant second opus, dont l’audace confère à de la petite orfèvrerie art-pop. De sa voix traînante sur le morceau d’ouverture What If I, à la petite ritournelle épurée Identity, la balade célesto-mélancolique Memories Gone au plus percussif Ritmo de Vida, avant de se clore sur l’entrelacs de voix de Naturaleza, Malena Zavala signe une perle aux doux reflets multiculturels. Il nous aurait attristé de passer à côté de cet album précieux.
Jaunt – All In One (LP)
Notre morceau préféré : « Delighted To Be Spoken To »
Originaire de Toronto, Jaunt démantèle les structures pop pour les recomposer avec leur touche rêveuse. Mélangeant des sonorités brutes avec des harmonies complexes, des sonorités acoustiques avec des voix travaillées, le groupe fait sa tambouille en piochant dans un paquet d’influences distinctes : jazz, hip-hop et funk composent les différentes couches de leur pop alternative. Les pistes s’enchevêtrent et bataillent pour exister, apparaissent avec un demi-temps d’avance, et déstabilisent notre oreille pour la choyer. Conçu sur trois ans avec Alex Sowinski (BADBADNOTGOOD), ce disque est une ode à la créativité dans son élan le plus simple et le plus perfectionniste, faisant de ce sextuor (!) leadé par le guitariste Pat O’Brien et le chanteur Tom Helliwell un des espoirs les plus immédiats d’outre-Atlantique.
Arnaud Rebotini – The Masquerade (EP)
Notre morceau préféré : « The Masquerade »
Chaque vendredi confiné, l’éternel producteur Arnaud Rebotini balance un titre inédit accompagné de remixes de celui de la semaine précédente. On pensait que le gaillard se prendrait les pieds dans le tapis avec cette régularité de métronome. Que nenni. Plus que jamais émancipé avec The Masquerade, le voici au sommet de sa forme après un mois de quarantaine entre quatre murs de synthés modulaires. Bien bâti et bien vêtu comme son géniteur, ce nouveau single du patron de Black Strobe Records s’habille d’un carnaval acide de machines, inspiré de « la grande créativité des gens pour fabriquer et personnaliser leurs propres masques ». Accompagné de remixes de The Hacker, Leonie Pernet, Etienne Jaumet et Illegal Jogging Turzi et d’un clip en collab’ avec l’INA, le boss n’a pas fini de faire danser les balcons.
(Re)lisez notre interview d’Arnaud Rebotini.
Orfilab – Nano (EP)
Notre morceau préféré : « Sodade »
Voilà un jeune duo de bedroom producers plein de promesses. Iris & Geoffray d’Orfilab marient une production électro progressive avec un chant lancinant, que leur premier quatre titres V.I.S.I.O annonçait déjà en 2016. Se mesurant à l’exercice épineux de l’écriture onirique en langue française, la voix versatile de la chanteuse s’appuie et rebondit sur les lourdes nappes de synthés pour prendre de la hauteur. Les deux tracks Au Large d’Amalfi et le single Sodade se détachent naturellement pour leur appropriation des codes de l’electro pop downtempo, joliment revisités avec une production scintillante et instinctive. Après un premier opus chanté en anglais et moins expérimental, le groupe précise sa ligne de conduite poétique en s’aventurant aux confins de la mélancolie, quitte à prendre plus de risques sur certains titres (Naufrage, Terre). La chance sourit aux audacieux.
Lësterr – The World Sucks (EP)
Notre morceau préféré : « The World Sucks »
L’emo-electro tu connais ? Signé sur Bordel Records, la maison électro fondée par Maud Geffray & Sebastien Chenut, le jeune producteur Lësterr droppe sa nostalgie des années 2000 en deux titres prometteurs. Entre des craquements de chips et des synthés sonnant comme un Haribo passé à la MAO, l’artiste pourrait être l’enfant illégitime d’une soirée qui aurait dérapé entre Grimes, Purity Ring et TR/ST, ou le lointain cousin de Panteros666 et le frérot du trio Las Aves. L’artiste incarne ce cool parisien pas péteux, celui qui s’écoute en boucle et se déguste à toutes heures : en before d’une soirée warehouse en réalité virtuelle ou en s’imaginant folâtrer sur l’herbe fraîche d’un fond d’écran Windows 98.