Fondateur et ex-rédacteur en chef d'Arty Magazine, le grand manitou…
Basé à Bruxelles, le photographe documentaire Antoine Béguier met en lumière la France délaissée des campagnes avec sa série La Traversée des ombres, réalisée sous la chaleur écrasante de la canicule de 2020.
En quête de réel et de picturalité, Antoine Béguier a longtemps arpenté le monde pour tourner son objectif vers les invisibles : les contrées isolées du Kurdistan iranien, la sérénité brute des steppes kirghizes, ou le plus ancien port de Jakarta. Amoureux des grands espaces, plus particulièrement de l’Iran et de l’Asie Centrale, le photographe part à la rencontre des peuples déconnectés de la mondialisation, victimes collatérales des changements environnementaux.
En 2020, retour à la maison pour l’enfant de Perpignan. La France et ses zones rurales, terres de récits intimistes et de paysages pittoresques, lui tendent les bras pour sa nouvelle série photographique La Traversée des Ombres. Sa plongée au cœur de la diagonale du vide ne se fait pas sans la promesse d’un dépaysement : « Argonne, Morvan, ou Aubrac sont devenues de nouvelles invitations à l’exotisme » confie t-il lors d’un entretien pour Fisheye Magazine.
Face au réchauffement climatique
Sous un soleil qui ne dort jamais, la population harassée trouve refuge dans la moiteur d’une toile cirée d’Argonne, la fraîcheur d’un lac du Morvan ou l’humidité d’une nuit en Lozère. Au constat humain s’ajoute la réalité implacable d’un climat détraqué, qui assèche la terre nourricière et diminue les récoltes, sans entamer le cœur des populations locales : « De tous les gens que j’ai rencontrés, aucun ne souhaite quitter la campagne. Tous louent une qualité de vie extraordinaire, la beauté du quotidien, et sont attachés à la spécificité de leur terroir » ajoute t-il pour Fisheye.
Avec une densité de 9 habitants au m2, soit à peine plus qu’au Kazakhstan, c’est tout un modèle humain et environnemental qui est questionné. Si la désertion de la diagonale n’est pas nouvelle, les canicules à répétition interroge la viabilité des terres françaises délaissées. Autrefois présence bienveillante et essentielle, le soleil est désormais révélateur d’un modèle à bout de souffle, que le photographe saisit dans un travail esthète qui en appelle à Raymond Depardon et Edward Hopper.
Une reconnaissance internationale
Acclamés et reconnus, les récits intimistes d’Antoine Béguier ont bénéficié de nombreux focus. L’une de ses dernières séries, La Vie Kirghize, a été exposée à L’Harmonium en Bruxelles en 2018, et à Terres d’Aventures à Paris en 2019. Surtout, il a été shortlisté pour le Prix Fotofever 2020 organisé au Carrousel du Louvre.
Antoine Béguier est également membre du collectif iranien RAVI Photos, fer de lance d’une photographie documentaire à portée sociale.