Les Capsules : Pam Risourié, la bedroomgaze qui va vous faire planer
Fondateur et ex-rédacteur en chef d'Arty Magazine, le grand manitou…
Depuis leurs débuts, Pam Risourié a souvent été comparé à la rencontre entre Sonic Youth et Beach House… Et on aurait tort de se priver d’un name-dropping aussi alléchant. Passé l’effet de manche, ce sont leurs pédales d’effets et leurs harmonies de guitares qui forgent leur identité si singulière. Un sous-genre a même été inventé pour qualifier leur musique : le « bedroomgaze », contraction de bedroompop et de shoegaze.
Marin : Hello Pam Risourié. Ton premier article sur le blog Fort & Viril caractérisait ton son de « Bedroomgaze ». Tu peux nous expliquer à quoi fait référence cette définition ?
Pam Risourié : Un sous-genre un peu hybride entre l’aspect lo-fi de la bedroom pop, le côté éthéré de la dreampop, les nuages du shoegaze et des facettes plus sombres du blackgaze. Ça fait beaucoup de termes et de sous-genres ! Mais du coup celui-là, le « bedroomgaze », correspondait plutôt bien à mon premier EP. Ça véhicule l’idée de quelque chose de sincère, do-it-yourself, fait avec peu de moyens, dans une chambre, tout seul ou entre amis.
M. « Pam Risourié », c’est toi, Pam. Pam Risourié, c’est aussi cinq têtes, trois guitares, une basse et une batterie. Tu me présentes les membres du groupe ?
P. Oui c’est moi, c’est vous, c’est nous (rires). Plus sérieusement, on vient tous de différents projets sur Paris, on avait déjà partagé la scène avant dans d’autres formations. Il y a Gauthier qui a joué dans Magon et Butterscotch Hawaiian, avec qui j’ai joué un temps dans Terry & the Bums. Les jumeaux, Antonin et Vincent, de Gliese And Kepler, un groupe assez proche de notre style, qui fait aussi partie de Lofish Records [NDLR : Label Montreuillois de rock]. Vincent alterne la basse et la batterie avec Max, qui a joué dans plusieurs formations à Bordeaux, notamment John Sushi & the Bastards, un des meilleurs noms de groupes ever.
M. Pour annoncer ton EP Rituals sorti le 04 octobre 2019, tu t’es fendu d’un post sur Facebook : « Un premier EP enregistré dans la chambre de Hugo Van Mol par son susdit propriétaire au printemps 2018. » Tu me racontes ?
P. Je voulais enregistrer Rituals avant de partir faire le tour de l’Asie du Sud en moto avec un ami. Je n’avais pas forcément prévu de retour, en tout cas pas forcément dans l’année. J’ai enregistré ça juste avant chez un copain, Hugo, avec qui j’avais joué dans Niko Yoko, du temps où c’était un groupe de rock. C’était une période pas évidente entre les cartons de déménagement et les peines de cœur. Puis, sur les routes de l’Inde, je me suis rendu compte qu’il y avait encore beaucoup trop de choses qui se passaient dans ma tête, j’avais encore plein de morceaux à enregistrer et aussi que je n’aurais pas du tout l’argent pour faire le tour de l’Asie. Du coup je suis rentré au bout de 6 mois, j’ai monté le premier clip Another Sun avec les images de là-bas et j’ai lancé le projet.
M. J’ai été très agréablement surpris face à la fluidité de votre live alors que les titres No King At Your Bones et Disappear For Me joués aux Capsules ne sont pas encore sortis. Comment prépares-tu le passage du studio à la scène ?
P. Merci ! No King At Your Bones figurera sur l’EP Noctessa qui sortira le 29 mai. Et Disappear For Me sera pour plus tard pour quelque chose de plus gros… On avait un peu d’appréhension pour cette vidéo car on jouait ensemble depuis à peine plus d’un mois. Mais finalement ça s’est super bien passé, l’ambiance était top grâce à l’équipe des Capsules et de Lofish. Même si avec le recul, c’est évident qu’il y a plusieurs éléments qu’on joue mieux maintenant. Pour la préparation, je fais souvent des démos auparavant, ensuite on les réinterprète avec le groupe, les autres amènent leurs idées, on voit comment ça sonne… Mais on évolue de plus en plus vers quelque chose de plus collectif.
M. Peux-tu me parler de l’EP Noctessa attendu le 29 mai ? As-tu une petite info en exclu pour nous mettre l’eau à la bouche ?
P. Noctessa a été enregistré en octobre dernier chez Alexis Fugain, du groupe Biche, que plusieurs amis m’avaient recommandé. Je l’ai mixé avec Grégoire Yeche, un copain de passage à Paris qui travaille avec Steve Albini, au studio Electrical Audio à Chicago où j’avais fait un stage. Le thème principal est celui de la nuit intérieure, des sentiments, des souvenirs, des choses un peu voilées et sombres qu’on garde au fond de nous, qu’on n’ose pas forcément s’avouer, qui peuvent nous aveugler, être belles comme un rêve ou prendre les formes monstrueuses d’un cauchemar. Ça sonne assez profond dit comme ça, mais pour te donner une info en exclu, il y aura sûrement un troisième clip sur cet EP. Un truc pas forcément profond pour le coup, qu’on a tourné cet hiver à Helsinki avec un ami, où il sera question d’alcool, de nudité (on évite le terme « exhibitionnisme »), d’une nuit en garde à vue et de violence… Voire du racisme de certains videurs en boîte de nuit, tout ça réalisé sans trucage. Mais ça devrait être mignon quand même.
M. Et comme c’est la tradition chez Arty Magazine, quelle est ta définition d’un artiste ?
P. Il y a cette phrase de Baudelaire : « Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or ». Je trouve que ça résume assez bien l’idée d’essayer de créer quelque chose de beau, ou plutôt une esthétique, à partir de sentiments qui ne le sont pas forcément. Je ne partage pas particulièrement l’idée que tout le monde puisse être artiste, même si on a tous une part de créativité, d’idéal, de rêve inassouvi. Être artiste pour moi, c’est quelque chose de marginal, de nécessaire, c’est presque une condamnation.