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« ADN », le nouveau film de Maïwenn entre quête de soi et blessures familiales

« ADN », le nouveau film de Maïwenn entre quête de soi et blessures familiales

Camille Castres

Le sixième long métrage de Maïwenn se veut le film contre les racismes de tous poils, celui qui prône l’ouverture d’esprit. L’actrice-réalisatrice y traque ses origines autant qu’elle dévoile rancœurs et déchirures familiales après la mort du grand-père algérien, figure tutélaire de la fratrie. ADN est un film intime sur le travail de deuil et un porte-étendard en faveur de la tolérance et du multiculturalisme.

Pour aborder cette thématique, la réalisatrice de Polisse (2011) et Mon Roi (2015) a choisi le truchement du deuil en demandant : qu’est-ce qu’un parent, d’origine algérienne, nous laisse en héritage et que faire de ce legs ? Mettant au jour, assez rapidement, les querelles familiales à la suite d’un décès, Maïwenn s’interroge sur le poids de cet héritage.

Partager un héritage en famille, ce n’est pas la joie

Neige, incarnée par la réalisatrice, est une mère de trois enfants, divorcée, qui rend régulièrement visite à son grand-père algérien à la maison de retraite où il vit désormais. La mort de ce pilier de la famille, qui l’a élevée et protégée contre la toxicité de ses parents, va déclencher une véritable tempête au sein de la cellule familiale où les tensions sont palpables. Et surtout, ce décès va provoquer une profonde crise identitaire chez Neige. Se dessine alors une volonté farouche de comprendre où ses racines se sont puisées.

La quête de ses origines, un besoin obsessionnel…

La question de nos origines taraude car elle interroge l’essence même de notre existence. Comprendre d’où l’on vient peut parfois s’avérer vital. C’est ce message honnête que Maïwenn nous délivre avec sincérité et émotion dans ADN. Le titre prend d’ailleurs tout son sens lorsque Neige, que la réalisatrice incarne, commande sur internet un kit de prélèvement buccal qui lui indiquera son pourcentage d’origine étrangère. Charlatanisme pour certains, c’est ici un besoin absolu pour cette quadragénaire en quête d’identité.

Quand tu partages les résultats de ton test ADN ethnique

Alors même que la réalisatrice récuse l’idée d’un long-métrage autobiographique, qu’elle juge trop réducteur, on analyse rapidement au fil du film qu’elle y a mis toutes ses tripes. « Le personnage du grand-père ressemble au mien… Tout comme mon personnage et le film d’ailleurs », confesse-t-elle. On loue l’intention d’y mettre tout son cœur mais n’est-ce pas de manière trop forcée, parfois ? Plutôt que de parler de faiblesse du scénario, disons que chaque personnage réagit différemment sur des questionnements qui touchent son âme intérieure. Neige ne s’alimente plus tandis que son père, qui vote FN malgré ses origines vietnamiennes, la fait souffrir, elle qui ne rêve que de métissage et de découvrir, sinon le monde, au moins l’Algérie. La noblesse de ce film, sélection officielle 2020 du Festival de Cannes, réside dans son désir de mettre des mots et des images sur notre rapport aux autres cultures.

…révélateur de tensions familiales et de maladresse

Si la tolérance s’avère le fil conducteur du film, elle n’en est pas moins malmenée au sein de la cellule familiale. Les discussions électriques, qui agitent la famille après la mort du grand-père, le prouvent. Au sujet des funérailles, Neige s’appuie sur les dernières années de son grand-père pour organiser la cérémonie, alors que l’un des frères retient sa jeunesse communiste. S’ensuit un débat animé sur la religion, la laïcité et la culture musulmane. Chacun cherche donc à organiser un enterrement qui ressemble à l’image qu’il garde de l’aïeul, le ton monte, la famille s’invective, s’insulte parfois. Pour autant, chacun a raison.

Le feu couve entre Fanny Ardant et Maïwenn

En choisissant de filmer le deuil, la réalisatrice flirte avec le risque. Le côté « tire-larme » aurait pu prendre le pas, mais non ! Maïwenn, qui a écrit ce film avec Mathieu Demy, le fils d’Agnès Varda, récemment décédée, prend le contrepied en apportant une tonalité drolatique lors de certaines scènes bien réalisées. Et pour détendre l’atmosphère, la palme revient à Louis Garrel, qui incarne l’ex de Neige, dont il est finalement devenu l’ami bout-en-train. Sans taxer l’œuvre de whitewhasing, et même si chaque acteur campe parfaitement son rôle avec une sensibilité aiguisée qui n’est plus à prouver, il est parfois difficile de leur imaginer des origines algériennes. Pour donner plus de sens et de crédibilité à son histoire, peut-être Maïwenn aurait-elle dû réunir un casting davantage multiculturel, à l’image du discours qu’elle défend.

ADN
Réalisé par Maïwenn
Avec Maïwenn, Fanny Ardant, Louis Garrel
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