Qui sont les grands gagnants du 28ème festival fantastique de Gérardmer ?
Fondateur et ex-rédacteur en chef d'Arty Magazine, le grand manitou…
La Nuée d’insectes de Just Philippot et Teddy des frères Ludovic et Zoran Boukherma ont raflé la majorité des prix de cette édition 2021.
Qui a suivi le marathon de l’horreur sur le site de Gérardmer ? Cette année, fait inédit et pas des moindres, le Festival International du Film Fantastique a troqué ses quartiers dans les Hautes Vosges pour une édition exclusivement en ligne du 27 au 31 janvier 2021.
Moyennant un pass de 50 euros pour accéder à l’ensemble des films – ou 5 euros par séance, la version digitale de Gérardmer a permis de démocratiser l’accès à sa sélection foisonnante. Inutile de préciser que la connexion au site web du festival relève moins de la gageure qu’un billet « all inclusive » pour les Vosges. L’occasion de prendre la température du cinéma de genre avec 12 films en compétition, dont les très attendus Host de Rob Savage, Possessor de Brandon Cronenberg, Teddy de Ludovic & Zoran Boukherma ou encore The Stylist de Jill Gevargizian. La situation sanitaire a parfois du bon.
Des loups-garous dans les Pyrénées…
Quels films ressortent grands gagnants de cette édition numérique ? Les français, en premier lieu. Teddy, le surprenant film français de loup-garou réalisé par les frères Ludovic et Zoran Boukherma, repart les bras chargés de récompenses : Prix du Jury (ex-aequo avec Sleep) et Prix du Jury « Jeunes ». Les deux anciens élèves de l’École de la Cité ont fait leurs armes sur leur premier long métrage, Willy 1er, co-réalisé avec Marielle Gautier et Hugo P. Thomas, qui avait été auréolé à l’époque du Prix d’Ornano-Valenti au Festival au Cinéma Américain de Deauville.
Avec la même tendresse débordante pour leurs personnages, les deux frangins embarquent cette fois pour les Pyrénées où un loup attise la colère des villageois. Teddy, 19 ans, sans diplôme, va se faire griffer une nuit de pleine lune par une bête poilue aux dents longues… Entre film d’horreur, comédie et drame social, le long métrage se veut la relecture gauloise du folklore lycanthropique, avec une pointe d’humour qui n’est pas sans rappeler les saillies absurdes de P’tit Quinquin de Bruno Dumont.
…Et une invasion d’insectes à la campagne
Second film français à s’être démarqué, La Nuée de Just Philippot a reçu le Prix du Public et le Prix de la Critique. Encensé pour son court métrage Acide en 2018, le cinéaste s’engage sur le même terreau écologique mâtiné de genre avec son premier long métrage. C’est l’histoire d’une mère de famille interprétée par l’épatante Suliane Brahim, qui développe un étrange lien obsessionnel avec les sauterelles qu’elle élève. Ajoutes-y une pincée de drame familial, une once de thriller agricole dans la veine de Petit Paysan, et un saupoudrage fantastique dans la lignée de Les Oiseaux d’Alfred Hitchcock, et on obtient la recette du cocktail détonnant signé Just Philippot.
Enfin, c’est un talentueux « fils de » qui s’est illustré à Gérardmer avec Possessor. Nom : Cronenberg. Prénom : Brandon. Profession : réalisateur comme papa. La progéniture du mythique David Cronenberg a remporté le Grand prix du festival en marquant les esprits avec la violence décérébrée de son second long métrage, successeur d’Antiviral en 2012. Déjà remarqué au festival de Sundance, ce long-métrage sur des assassins en col blanc qui prennent le contrôle du corps de leurs victimes a aussi emporté l’adhésion des mélomanes, en remportant le prix de la Meilleure musique pour son compositeur Jim Williams.
Mais le véritable gagnant au palmarès n’est ni un film, ni un cinéaste. C’est le producteur et distributeur The Jokers qui a co-produit les deux films de Just Philippot et des frères Boukherma, tout en distribuant celui de Brandon Cronenberg. Victoire écrasante par K-O pour la boîte mordue de films de genre.