Crise du box office : Quel bilan tirer de l’année 2020 selon le CNC ?
Grande adepte des burgers maison et des baskets à plateforme,…
Crise sanitaire oblige, les salles obscures n’ont jamais aussi bien porté leur nom… Puisque celles-ci sont restées fermées 162 jours en 2020. Triste bilan et conséquences affligeantes.
L’année 2020 est à effacer de nos mémoires mais surtout de celle des salles de cinéma. À s’y attendre, la pandémie qui a contraint la fermeture de nos salles pendant des mois, a conduit les revenus du box office dans une chute prévisible mais considérable. Pas étonnant, donc, d’apprendre que le CNC annonce que la fréquentation des cinémas s’est effondrée de plus de 70 % durant l’été 2020. Conséquence de l’épidémie, de l’absence des traditionnels blockbusters estivaux et des règles radicales et obligatoires du maintien d’activité dans les salles. Néanmoins, la France n’était pas encore atteinte par la crise sanitaire que les indicateurs semblaient déjà tendre vers le rouge en début d’année 2020.
On fait le bilan, calmement
Même au niveau européen, l’UNIC confirme que « les cinémas ont enregistré un recul de 70,6 % du box office en 2020, soit une baisse totale de 6,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires par rapport à 2019 ». À savoir, que dans l’Union Européenne, 2019 avait été la meilleure année pour le cinéma avec une fréquentation record s’élevant à la barre du milliard pour la première fois depuis 2004. De ce point de vue, l’année 2020 a ainsi été une année épouvantable pour la totalité du secteur culturel : à l’image de l’UE, on y constate une baisse de la fréquentation de presque 70 %. Ambiance.
Retour sur une année dramatique…
Dès la fin du mois de février, certains départements français ferment leurs cinémas, de façon préventive. La progression du virus convainc les autorités d’interdire tous les rassemblements de plus de 100 personnes, sommant les salles de s’adapter en limitant leur capacité d’accueil. Nous sommes le 13 mars 2020. Disposition de courte durée puisque le lendemain, le gouvernement ordonne la fermeture de tous les lieux publics non essentiels à la vie du pays, dont les cinémas. La règlementation est opérée dans la plupart des pays. Conséquence : entre les mois de mars et de mai 2020, plus de 300 films ont été reportés aux États-Unis, par exemple. Malgré le déconfinement, le 11 mai, les cinémas ne rouvrent que le 22 juin 2020.
L’été est synonyme d’une très faible fréquentation et certains cinémas, tournant à perte, prennent même la décision de refermer leurs portes. Par ailleurs, le manque de blockbusters américains, les dispositions sanitaires et le besoin des français d’être à l’extérieur n’encouragent et ne facilitent pas le retour en salles. Fin août, le gouvernement promettait un dispositif de compensation des pertes d’exploitation pour les salles de spectacles et de cinéma à hauteur de 100 millions d’euros, et une main-forte d’un montant de 17,7 millions pour les distributeurs. La répartition de ces aides devait conditionner l’avenir du cinéma français et en particulier les projets les plus fragiles et à petits budgets, dépendant notamment du système de redistribution des richesses de l’industrie du cinéma.
Qui pour le moment, continue…
Ouvertes, les salles sont soumises à un couvre-feu le 16 octobre 2020, entraînant l’annulation des séances du soir, avant de fermer totalement le 30 octobre, au même titre que les théâtres et les musées. Nous sommes aujourd’hui en février 2021 et les salles restent fermées, entraînant, par la force des choses, de nombreux films à annuler leur sortie pour être visibles immédiatement sur les plateformes VOD, provoquant l’indignation des professionnels du secteur.
Si la fréquentation des salles de cinéma s’est effondrée, c’est également dû à l’absence quasi totale de blockbusters sur nos écrans. Donnée qui, en fin de compte, dénote de notre importante dépendance aux distributeurs américains. Cependant, bien que les productions hollywoodiennes occupent d’ordinaire le podium au box office, la part des films français a récemment (et de manière exceptionnelle) été plus importante que celle des films américains, avec respectivement 29,2 millions contre 26,6 millions d’entrées.
Finalement, en temps de crise, le cinéma français a dynamisé à lui seul le marché de la toile, et, bien que ces chiffres ne soient pas réellement satisfaisants, ils aspirent à un certain optimisme. Le CNC estime, tout de même, que le manque de productions américaines dans les salles françaises, a soulevé une perte d’environ 90 millions d’entrées, ce qui implique, malheureusement, moins de recettes et de budgets à investir dans le cinéma français de demain.
Quid de l’avenir ?
Plus généralement, la crise liée au Covid-19 a précipité les mutations que subissait le secteur culturel depuis quelques années. Entre la baisse d’affluence dans les salles et la compétitivité du streaming, la crise sanitaire n’a fait que cristalliser et accélérer ces changements. 2020 est, d’un point de vue industriel, une année charnière dans l’histoire du cinéma : toutes ces décisions ont fatalement et incontestablement changé le visage du cinéma français.
Cependant, il y a encore bien des façons d’analyser un déclin considérable de fréquentation, que certains acteurs de l’industrie n’hésitent pas à illustrer et à expliquer comme l’inévitable mort du cinéma. Selon ce point de vue pessimiste et désespéré, la crise sanitaire actuelle ne va qu’accentuer ce phénomène déjà solidement installé. Néanmoins, si l’on considère les chiffres des années passées, rien ne semble présager la mort des salles de cinéma. C’est que le bilan de l’année 2019, remarquable en termes de fréquentation (213,07 millions de tickets de cinéma vendus) accentue la brutalité de la chute, par comparaison.
Pensons positivement : oui, pendant l’été 2020, plusieurs films ont été de francs succès. Les français.es ont affronté la peur du virus en se rendant au cinéma. S’ils sont nombreux à lui pronostiquer un avenir noir, les chiffres, eux, réfutent cette impression de lassitude et d’essoufflement des salles de cinéma… Malgré tout, l’industrie du cinéma français a pu compter sur ses productions locales, à l’image de Garçon Chiffon et ADN, notamment, dont les jolies carrières ont pris le deuxième confinement de plein fouet.
Les distributeurs indépendants, ayant pris le risque de sortir leur film malgré la crise et les restrictions sanitaires, ont souvent trouvé un public. En définitive, cette période où se mêlent improvisation et adaptation, s’avère ne pas prophétiser la mort des salles mais plutôt insister et affirmer l’intérêt et la nécessité d’un cinéma diversifié, en même temps que le devoir de le défendre et de le promouvoir.