3 raisons d’aller voir « 1917 » de Sam Mendes
Fondateur et ex-rédacteur en chef d'Arty Magazine, le grand manitou…
Faisant de son tournage en plan-séquence un excellent argument marketing, la nouvelle super-production de Sam Mendes nous plonge au milieu des tranchées. On te donne 3 bonnes raisons d’aller voir ce drame historique ambitieux.
Récemment, Sam Mendes s’était fait remarquer pour ses deux adaptations de la licence James Bond, du virtuose Skyfall au décevant Spectre, pouvant l’apparenter à un « yes man » du blockbuster anglais d’espionnage. Mais ce serait trop rapidement oublier que le cinéaste jouit d’un sacré pedigree d’auteur, avec des œuvres sensibles et intimistes comme American Beauty, Away We Go et Les Noces Rebelles, et avant même au théâtre comme metteur en scène.
Ce nabab du cinéma d’auteur, l’un des derniers à soulever des budgets faramineux pour des projets toujours plus ambitieux, est aussi partie prenante de la course aux Oscar. Il en est d’ailleurs déjà familier, puisqu’il obtenait la reconnaissance de la profession en 2000 pour American Beauty, auréolé de l’Oscar du meilleur réalisateur. Si 1917 est le film de tous les enjeux, quelles sont les 3 raisons d’aller le voir en salles ?
01 – La petite histoire dans la grande Histoire
Schofield (George McKay) et Blake (Dean Charles Chapman) sont deux soldats anglais pris dans la tourmente de la 1ère Guerre Mondiale. Leur mission : porter un message derrière les lignes ennemis pour empêcher la mort de centaines de soldats, dont le frère de Blake. À leurs côtés, Sam Mense évite l’artillerie lourde pour se concentrer sur les peurs et les angoisses des soldats, au plus près de leur visage. L’un des parti pris forts est notamment de représenter les allemands tapis dans l’ombre, comme une menace sourde dont on ne voit pas l’humanité.
Pour autant, le réalisateur ne se restreint pas de nous offrir un lot de séquences mémorables, comme lors du premier assaut depuis les tranchées, ou la visite d’un village en ruines aux lumières des explosions. Fidèle à sa réputation de conteur, Sam Mendes n’en oublie pas d’en être un divertisseur.
02 – Des plans-séquence à gogo
C’est l’un des arguments marketings phare du film : 1917 a été tourné en un plan-séquence. Qu’en est-il vraiment ? Débarrassé de tous les artifices de montage, Sam Mendes nous entraîne dans une course haletante sur le front, maintenant une tension permanente dans les tranchées et favorisant l’immersion aux côtés de ses deux personnages principaux.
Techniquement, comme l’avait réussi Birdman d’Alejandro González Iñárritu, il s’agit bien sûr d’un ensemble de plans-séquence mis bout à bout, mais de la manière la plus invisible qui soit. En tant que cinéphile rôdé à l’exercice de style, on s’amuse à chercher les coutures qui lient ces « continuous shots », le plus long « vrai » plan-séquence faisant 8 minutes 30. Ce découpage invisible garde une visibilité, et surtout, met l’action au service de la narration. C’est donc autant un spectacle ludique qu’un vrai parti pris de mise en scène.
03 – L’hommage de Sam Mendes à son grand-père
Sam Mendes met un point d’orgue à nous convaincre historiquement. Le cinéaste s’est attelé lui-même à l’écriture du film, et cela pour la première fois. L’inspiration première est le parcours de son grand-père, Alfred, enrôlé en 1915 avant de servir pendant deux ans pour la First Rifle Brigade en Flandre. Il raconte que ses histoires de guerre gardaient « […] petits et arrière-petits-enfants captivés pour des nuits entières. »
Si le parcours de Schofield et Blake suit bien des événements fictifs, le film gagne en réalisme par l’héritage familial de conteur. Prenant moins de libertés historiques que Stanley Kubrick avec ses Sentiers de la Gloire, Mendes s’est aussi appuyé sur le travail de ses chefs costumiers Jacqueline Durran et David Crossman, ainsi que son chef décorateur Dennis Gassner pour renforcer le réalisme… Mais c’est bien à son grand-père qu’il rend hommage à travers un carton de fin émouvant.