Interview : Alice et moi, le secret d’un double je
Fondateur et ex-rédacteur en chef d'Arty Magazine, le grand manitou…
Alice et Moi est double comme ses alter egos de chanteuse talentueuse et de personnalité attachante, qui de question en question, devenaient de plus en plus manifeste. Nous sommes partis à la découverte de ses multiples facettes.
À écouter ses réponses où chaque mot danse plein de vie, notre interview d’Alice et Moi ressemble à s’y méprendre à une chanson en français. Pourtant nous ne sommes pas sur scène mais la chanteuse de Filme Moi, C’est toi qu’elle préfère, et Je veux sortir avec un rappeur se livre avec la même énergie communicatrice que face à son public. D’un style qui lui est propre, Alice nous captive en s’inscrivant dans l’air du temps.
En octobre dernier, l’artiste dévoilait son EP autoproduit Filme Moi, tribulations d’une cam-girl à l’ère de l’addiction digitale. Son succès indie a été confirmé d’une release party sold-out à la Boule Noire. Des écoutes virtuelles au réel du concert, la chanteuse se révèle double et passionnante – bien plus que l’interprète « fraîche » et « délicieuse » à laquelle certains médias essaient de la résumer. Alice et moi révèle les secrets de son double je.
Alice. À la base cet œil, c’est quelque chose de personnel. Je le dessinais à 14 ans sur ma main, ça me permettait de voir les choses autrement, de m’imaginer plus mystique, plus forte, entrer dans un autre monde.
J’ai toujours lié l’image à la musique. Les Inrocks m’avaient découverte quand j’étais encore à fond dans mes études. Je ne pensais pas que j’aurais la force de me dire : « j’arrête tout, et c’est ce que je ferais tous les jours de ma vie ». Quand j’ai pris cette décision, c’est là qu’Alice et Moi est né.
A. Je vais parler d’un truc, que j’avais trop kiffé en prépa. J’espère que ça ne va pas me faire passer pour une meuf trop nerd (rires). Mon prof de littérature nous avait parlé du fait que quand tu lis un poème, le poète y place son intention, et le lecteur y mets de lui.
Je sais que quand j’écris, je vais partir d’un sentiment que j’ai. Mais plutôt que de parler de faits réels qui me sont arrivés, « hier à minuit, à Jules Joffrin », je vais parler d’une émotion comme se sentir isolée en soirée.
A. Pour « C’est toi qu’elle préfère » par exemple, je trouve dingue que tout le monde se demande en commentaires (ndlr : du clip) : est-ce que les deux jumelles sont jalouses de leur mère, ou c’est une fille qui est jalouse de son ex, à cause d’un garçon ? Je voulais parler du sentiment de jalousie, que tu sois hétéro ou pas, que ce soit ta sœur ou ton frère.
Julie (ndlr : la réalisatrice) m’a proposé l’histoire des jumelles. Quand j’ai écrit la chanson, je pensais à de la jalousie amoureuse comme fraternelle. Je trouve ça chouette d’ouvrir les interprétations.
A. Je crois que j’ai de la chance, car le public a su capter qui j’étais. Je ne mets pas de filtres par rapport à qui je suis. Sur la scène, j’ai vraiment l’impression d’être moi.
Quand j’ai fait l’une de mes premières scènes aux 3 Baudets, devant ma famille, mes amis, j’étais angoissée. Maintenant, je suis mal quand je ne fais pas de scène. Je ne suis pas la reine des transitions, mais j’ai l’impression qu’ils me comprennent, et pas d’être prise pour ce que je ne suis pas. J’ai toujours voulu être en harmonie avec les gens. Namaste (rires).
A. C’était un de mes meilleurs concerts. Je ne m’attendais pas à ce que la release party soit complète. J’en dormais pas, je me disais « imagine qu’à La Boule Noire, il n’y a que cinq personnes ».
Je me souviens de ce moment où j’arrive sur scène, je suis gonflée à bloc. Bam, la lumière me dévoile tout le monde. Je vois que c’est complet. J’ai faillir perdre tous mes moyens. J’ai ouvert avec « Filme-Moi », j’ai réussi à dire « j’veux tourner un film ». Le « j’veux », je ne l’ai quasiment pas dit… Et puis tout a coulé.
A. En concert, quand je chantais « Filme-Moi », certaines personnes prenaient leur portable pour me filmer. Je trouvais ça génial. C’était comme si, quand j’avais écrit cette chanson avec cette peur terrifiante de l’oubli, les gens s’en rendaient compte.
Maintenant, je leur dis « Allez-y filmez-moi, je n’ai pas peur ». À Cabourg, c’est la première fois que je les filmais en retour. Je trouve ça chouette qu’ils me voient et que je les vois aussi.
A. C’était mon compte personnel avant, je me suis rendue compte que je postais plus spontanément que sur mon insta pro. Comme aujourd’hui, je pense qu’il n’y a plus trop de séparation entre les deux, j’essaie de faire un mélange de pro et de plus perso.
C’est mon chat, il s’appelle Zanzou, je l’adore. Je pense que tu peux photoshoper une guitare, il a un look de rock star (rires).
A. Cette photo me représente car j’ai pas des tonnes de maquillage, c’est chez moi, j’ai mon EP dans la main. Je suis émue. C’est Randolph (ndlr : de Seasidz) qui l’a prise, il était là en tant qu’ami. Ça représente aussi la fierté que j’avais de sortir ce premier EP.
Je suis fière de ce que j’ai fait parce que je ne pensais vraiment pas l’avoir. C’est la même chose avec la scène. J’ai découvert que j’adore prendre le risque d’être face au jugement, de tout donner, de faire tomber toutes les barrières. Ça me plaît autant parce que je ne pensais jamais pouvoir. C’était le challenge ultime de ma vie.
Quand je suis sur scène, je suis vraiment moi… même si ça signifie être un peu des deux qui sont en moi.
Alice et moi en concert pour nous
Jeudi 19 juillet, à 19H00
Au Consulat de la Gaité, 2 Rue Vercingétorix – 75014 Paris
Entrée gratuite