« Manhattan Stories », quoi de neuf à New York ?
Fondateur et ex-rédacteur en chef d'Arty Magazine, le grand manitou…
Le récit choral de plusieurs destins liés entre eux par la musicalité de la Grosse Pomme.
La métropole s’éveille, les buildings attrapent les premiers rayons de soleil, un camion-poubelle broie des ordures sur What You Need du Gospel Ensemble. Ainsi s’ouvre Manhattan Stories. 1H24 plus tard, la fête bat son plein, des bras s’agitent, un coup de foudre se dessine sur One More Time des Redbone. Ainsi s’achève Manhattan Stories. Entre les deux, une histoire de destins pluriels aux trajectoires croisées.
L’entrelacement de mélodies citadines
Cela pourrait être l’histoire de n’importe quel quartier cosmopolite, mais c’est à New York, le berceau du cinéma mumblecore. Cela pourrait être toi, moi et tous ceux qui le veulent : ce sont les personnages de Claire, Phil, Wendy, Benny et Ray.
Du petit matin à la tombée de la nuit, Manhattan Stories suit des quotidiens liés par l’énergie galopante de la mégalopole. Par leur trajet, les personnages marquent les rues de leur mélodie journalière. À l’unisson, ils forment un hymne citadin. Avec son obsession quasi-documentaire, le réalisateur Dustin Guy Defa dresse une partition-monde, à la fois universelle et unique. Universelle comme la musique traverse les frontières. Unique comme ces destins singuliers, définis par ce qu’ils écoutent. Manhattan Stories figure un melting-pot chantant, à découvrir en trois notes distinctes.
À chaque personnage sa bande-son
Manhattan Stories est jazz. Benny est un collectionneur compulsif de vinyles. Il part à la poursuite du bail du siècle, la version red de l’album Bird Blows the Blues de Charlie Parker. En quête de la galette ultime, il traverse les blocks sur le tempo effréné du bebop. Bienvenue dans le New-York hippie chic, où l’imprimé d’une chemise devient une question existentielle. Chez nous, Benny habiterait à côté des Puces de Saint-Ouen.
Manhattan Stories est rock. Interprété par Michael Cera, Phil est un journaliste de tabloïds aux méthodes peu conventionnelles. Assisté par Claire, une stagiaire qui entame sa première journée, ils enquêtent sur un fait-divers sordide. Son autoradio diffuse du hard rock à tout berzingue. À Paris, il aurait bossé pour la section people de Voici, son objectif braqué sur la sortie des palaces.
Manhattan Stories est pop. Wendy, étudiante désabusée, garde en permanence ses écouteurs vissés sur les oreilles. À défaut d’entendre ce qu’elle écoute, on l’imagine avec des ballades pop de Claire Laffut et Billie Eilish. Si elle habitait à Paris, elle traînerait dans le quartier latin, non-loin de la Sorbonne ou du jardin du Luxembourg… À rêvasser d’une autre vie dans une ville étrangère, à New-York par exemple.