« The Father », un superbe huis clos récompensé aux Oscars
Défenseure activiste du Sun Spirit, proclamant à tue-tête qu’A stands…
Florian Zeller adapte sa pièce à succès, The Father, et signe un premier long métrage pour qui il ne voulait que le grand Anthony Hopkins. Spoiler alert : il l’a eu. On te donne notre avis sur le film doublement oscarisé.
Anthony, 81 ans, voit sa réalité se briser peu à peu tandis que sa fille, Anne, tente désespérément de l’aider tout en essayant de gérer sa propre vie. The Father traite le sujet de la vieillesse en adoptant principalement le point de vue de la personne âgée. On est happé par la réalité éclatée du personnage d’Anthony, nous-même perdus dans le labyrinthe de ses souvenirs morcelés et parfois erronés. Ce point de vue très immersif est contrebalancé par celui d’Anne, qui tente de faire preuve de patience par amour pour ce père qui lui en fait voir de toutes les couleurs.
Du théâtre au cinéma
Florian Zeller, écrivain et auteur de pièces de théâtre, faisait jouer Le Père en 2012. Côté ciné en revanche, il n’avait pas encore eu l’occasion de montrer l’étendue de son talent derrière une caméra, mis à part un court métrage en 2008. C’est aujourd’hui chose faite avec l’adaptation de sa pièce éponyme. C’est tout logiquement qu’il est également co-auteur du scénario. Pour ce premier essai concluant, il a su s’entourer d’un casting de rêve et d’une équipe prodigieuse. Mention spéciale à Ludovico Einaudi, le génie derrière la musique du film qui n’échoue jamais à souligner l’ampleur émotionnelle et dramatique de chaque scène.
Parmi le casting on retrouve le monument du cinéma, la légende, Anthony Hopkins, qui ne déçoit pas sous les traits du père qui refuse d’accepter sa condition. Tantôt drôle, tantôt exubérant, souvent dur, parfois particulièrement sadique, Hopkins nous dépeint avec brio le tumulte d’émotions que vit son personnage pour au final nous attendrir par sa fragilité et sa peur. À ses côtés, la non moins talentueuse Olivia Colman, dont la carrière longue comme le bras était (enfin !) mise au devant de la scène internationale avec La Favorite de Yórgos Lánthimos. À leurs côtés, Rufus Sewell, Imogen Poots, Olivia Williams et Mark Gatiss, tous à la hauteur du duo principal.
Justement acclamé par la critique
Pas évident de transposer une pièce de théâtre sur grand écran sans se casser les dents. Au théâtre, on a une unité de lieu et une bonne partie de l’intrigue repose sur les dialogues. Au cinéma, un tel procédé est rarement alléchant. Pourtant, le film connaît déjà un beau succès, mérité, auprès de ses pairs. Nommé 4 fois aux Golden Globes, The Father a remporté deux Oscars et deux BAFTA dans les mêmes catégories : Meilleur scénario adapté et Meilleur acteur pour Anthony Hopkins ; et on comprend pourquoi. Florian Zeller a parfaitement réussi à se jouer des contraintes du théâtre pour obtenir un film dynamique, malgré son nombre très restreint de personnages et de lieux, en apportant une attention remarquable au moindre détail.
On dit souvent de la vieillesse qu’il s’agit d’une retombée en enfance. Après avoir passé des années à apprendre, à interagir, à se construire pour se réaliser et s’affranchir, on arrive à un âge où l’on oublie. Les choses les plus simples du quotidien semblent devenir insurmontables, la mémoire s’apparente à une montagne dont on ne voit plus le sommet, à un arbre dont les racines ont disparu. Les souvenirs deviennent un labyrinthe, le défi de tous les instants est de ne pas s’y perdre au risque de jamais pouvoir retrouver la raison. The Father est une parfaite illustration de ces aspects. Aux côtés d’Anthony, on se débat pour donner du sens à ce que l’on voit, ce que l’on entend et ce que l’on pense savoir pour réussir à retrouver la raison, comme face aux pièces en vrac du puzzle de sa vie. Aux côtés d’Anne, on souffre à petit feu d’essayer d’aider ce père qui se noie dans les méandres de sa psyché et qui se débat avec véhémence, rendant chaque geste d’amour toujours plus douloureux.